Quest-ce que le moi ? Un homme qui se met à la fenêtre pour voir les passants, si je passe par là, puis-je dire qu'il s'est mis là pour me voir ? Non ; car il ne pense pas à moi en particulier. Mais celui qui aime quelqu'un à cause de sa beauté, l'aime-t-il ? Justice, force. » Telle est la façon qu’a Pascal d’introduire la thèse qu’il développe quant à la relation entre ces deux concepts. Il va s’efforcer tout au long de son texte d’articuler les deux notions sans même user de connecteur logique pour ce qui semble être le titre de ce texte. Une simple virgule sépare ces concepts, preuve en est de la difficulté à appréhender les liens existants entre d’une part la justice, et de l’autre la force. La thèse principale qu’il expose, et qui fait l’objet du commentaire à suivre, veut que seule, l’idéal de justice est impuissant ; et seul, l’usage de la force est illégitime. Deux solutions apparaissent alors possibles. La première considère que la force se met soit au service du juste, ou alors elle doit incarner ce qui est juste. La seconde voudrait que la justice étant faible et souvent remise en question, la force indiscutable s’impose et se légitime par la force. Pascal a une basse estime de l’humanité qui, selon lui, verrait son idéal de justice succomber devant la force. En d’autres termes, à ce que l’on peut comparer à un dilemme du prisonnier, l’homme ne choisira pas la solution Pareto-optimale coopération entre justice et force pour une meilleure société, mais son inclination naturelle le mènera à un équilibre de Nash sous-optimal par définition une force tyrannique rendue légitime par sa pratique. À la lecture de ce texte, on peut se demander de quelle manière justice et force peuvent s’articuler sans que la seconde prenne le dessus sur la première dans un processus autodestructeur. L’étude de ce texte s’effectuant dans le cadre de la justice globale, le deuxième défi de ce commentaire sera d’appréhender en toute modestie la portée des écrits de Pascal quant aux questions de justice globale. Ainsi, si justice et force sont deux concepts a priori contradictoires, ils n’en sont pas moins complémentaires ; d’autre part, bien que leur alliance étant souhaitable, celle-ci est pourtant impossible et la force s’affranchira alors bientôt de la justice et, à terme, la remplacera ; enfin, nous étudierons la possibilité de tester l’argumentaire de Pascal en focalisant notre attention non plus sur la justice, mais sur la justice globale. Cette réflexion en trois temps s’achèvera donc par l’étude de la justesse et de la contemporanéité de ce texte dans le contexte contemporain du développement, bien que ces questions seront adressées tout au long du commentaire. I. La justice et la force semblent s'opposer en théorie, mais restent indissociables en pratique De prime abord, la justice et la force que tout semble opposer en théorie, reste selon Pascal, indissociables en pratique. Il semble ici nécessaire de rappeler ce que l’on entend par justice et par force, afin de ne pas se méprendre, car les deux définitions sont larges. Par justice, il faut comprendre à la fois la norme du droit et ce qui est en conformité avec cette norme acception juridique, mais aussi l’adéquation entre le mérite et sa rétribution acception morale. Ces deux versants du même concept sont inséparables, bien que l’idée d’une justice sociale à l’échelle étatique comme à l’échelle globale relève plus du second aspect. Il ne faut donc pas entendre par justice, l’institution qui applique les choix de sociétés en cette matière, le pouvoir judiciaire étant par définition un pouvoir de coercition, qui met en pratique les lois. Par force, Pascal est moins précis et laisse planer une certaine ambigüité. En effet, dans son texte elle est tour à tour une force d’oppression, une force tyrannique » qu’il faut dénoncer, puis une force de coercition, vertueuse, qui agit au service de la justice, et incarnée par l’institution judiciaire par exemple. Une fois cette mise au point indispensable réalisée, il nous est possible d’appréhender l’antonymie théorique entre justice et force. Justice et force sont donc contradictoires. Selon Pascal, il est juste que ce qui est juste soit suivi » alors qu’ il est nécessaire que ce qui est le plus fort soit suivi ». La justice relèverait donc de l’obligation, et la force de la contrainte. L’obligation morale comprend la possibilité de s’y soustraire. Ainsi la justice ne pouvant s’imposer d’elle-même, car l’homme étant par nature intéressé, quel intérêt a-t-il de se soumettre au juste quant il peut s’en abstenir ? La justice comme toute obligation est impuissante ». La contrainte ne laisse aucun choix à celui qui se la voit imposer. Par ce travers, on peut y voir le caractère oppresseur et despotique de la force. En pratique pourtant, ces concepts sont complémentaires. L’idéal de justice est vain s’il ne peut se reposer sur la force pour s’appliquer. La force a besoin de la justice pour être légitime. Il existe donc une interdépendance entre justice et force. Afin de pallier à leurs carences respectives, leur alliance devient indispensable. Elle peut se réaliser de deux façons selon Pascal en conférant la force à la justice, ou en rendant la force juste. La justice seule est vite remise en question du fait de son statut d’obligation morale. La force seule sera contestée pour son arbitraire. Ainsi, quelle que soit la solution retenue, la force confère à la justice un moyen de contraindre, et la justice confère à la force une morale que l’on se doit par définition de respecter. II. Comment la force s'affranchie de la justice Néanmoins, s’il est dans le meilleur intérêt d’associer justice et force, Pascal, pessimiste quant à la nature humaine, affirme que la force s’est affranchie de la justice. La justice étant un concept à géométrie variable selon les individus et reste de l’ordre de la morale, tandis que la force est indiscutable, la seconde va donc prendre le pas sur la première. Ainsi, la justice serait sujette à dispute », et ce pour deux raisons. Ce qui est juste pour un individu ne l’est pas forcément pour un autre. Comme toute norme, la justice est discutable, et dans un contexte global, ce qui apparaît pour juste pour un Etat sera peut-être contesté par un autre. Les démocraties occidentales trouvaient injuste l’apartheid sud-africain. Pascal affirmait par ailleurs vérité au-deçà des Pyrénées, erreur au-delà » que l’on peut comprendre à ce sujet comme dénonçant le relativisme que revêt la justice. L’universalité des Droits de l’Homme, ou encore l’intemporalité du second amendement de la constitution américaine sont souvent remises en question. Aussi, la justice est sujette à dispute par quiconque s’en affranchit, et donc par le fait qu’il s’en affranchisse. Il est en effet possible rappelons-le de se conformer ou non à la morale du juste. Ainsi, l’homme peut agir par immoralité. Rien ne l’y contraint, vu qu’il n’y est qu’obligé. Si l’homme était en tout temps et en tous lieux moral, l’établissement d’une norme serait inutile. La raison d’exister de toute norme est cette capacité qu’a l’homme de déviance vis-à-vis de la norme. On peut donc la discuter aussi en agissant immoralement, soit parce que l’on pense que la norme n’est pas morale, soit parce que l’homme peut aussi être intrinsèquement immoral. La force, quant à elle, est incontestable, sans dispute », et reconnaissable » de tous. Tout le monde s’y soumet. Contrairement à la justice, la force reçoit un consensus unanime quant à ses attributs. En d’autres termes, le fort est par tous perçu comme tel. Cela n’est donc pas tant que tout le monde consent volontairement au pouvoir du fort, mais plus tôt que tout le monde finit par plier devant le fort. Qu’advient-il donc quand le juste est disputé » par le fort ? Si tout semble céder devant le fort, la justice ne résiste pas à ce raisonnement. Dans une fable de La Fontaine, on dirait que la raison du plus fort est toujours la meilleure », même s’il ne faut pas chercher dans le terme meilleure » une dimension morale, mais plutôt l’attribut du vainqueur d’un combat. Tout comme le loup finit par manger l’agneau, la force prend l’avantage sur l’idéal de justice. Indissociables, car complémentaires, la justice et la force sont néanmoins incompatibles. Ces deux notions ne peuvent être associées, car la force peut tirer avantage de la faille de la justice – la faiblesse – mais la justice ne peut prendre un avantage de la faille de la force – sa non-légitimité –, et c’est la raison pour laquelle selon lui on n’a pu donner la force au juste ». Pascal utilise ici un postulat hobbesien avant l’heure. Il ne voit pas l’homme moral ou vertueux, mais violent. C’est ainsi que la force outrepasse la justice ; mais comment fait la force pour ne pas à son tour se voir contredite ? La tyrannie finit toujours par être renversée par les oppressés, qui un jour deviennent donc plus forts que la force despotique. Pour éviter cela, le fort se légitime en contredisant le juste. Comme le dit si justement Bourdieu, on sait que tout exercice de la force s'accompagne d'un discours visant à légitimer la force de celui qui l'exerce ». C’est donc une solution sous-optimale que la nature de l’homme l’a conduit à choisir. L’expression ne pouvant faire que » utilisée par Pascal renforce cette idée. Ce texte dont la portée est générique peut être aussi analysé sous le spectre de la justice sociale globale, et son examen nous conduit à considérer sa contemporanéité sur les questions du développement. III. La justice sociale globale obligation ou contrainte ? On peut ainsi, suite à la lecture de ce texte à la lumière des enjeux contemporains de développement, se demander si la justice sociale globale, à l’image de la conception de la justice de Pascal, relève de l’obligation, ou de la contrainte. Puis, il apparaît important d’examiner si le schéma selon lequel la force l’emporte sur la justice s’applique pour la justice globale. Bien que la théorie de la justice de Rawls place la justice sociale comme une contrainte issue de ladite rationalité des individus placés sous le voile d’ignorance, l’extension au niveau globale, ou plutôt interétatique, de cette notion en l’espèce est impossible. Il faut donc repenser la justice globale comme une obligation morale, à l’image de l’étude pascalienne de la justice. Rawls avec sagesse repousse l’idée d’appliquer ses principes de justice à l’échelle mondiale, car trop spécifique. Dans le Droit des gens, il circonscrit le principe de différence au périmètre des Etats Nations. En effet, il comporte une dimension contraignante puisqu’il ne rend pas seulement immoral le sacrifice des plus démunis à la faveur des mieux lotis, mais l’interdit simplement. La clause anti-sacrificielle rend non-transposable au niveau global le second principe de justice rawlsien, et donc sa théorie. La justice globale relèverait donc plus de l’obligation morale, voire du devoir imparfait kantien. En effet, le transfert de ressources, l’aide au développement, s’inscrit dans une logique de publicité de l’acte, et du mérite qu’un Etat en tire à en aider un autre. On ne peut pas punir un Etat qui ne contribue pas à la solidarité globale. Tout au pire, c’est son image qui est touchée. On ne peut pas interdire le sacrifice des plus désavantagés, mais au mieux rendre le respect de cette clause vertueuse. Se pose ensuite la question de l’application de cet idéal vertueux que nous appelons de nos vœux. Comment faire de cette norme un droit positif ? Comment contraindre à donner quand le don est par nature volontaire, donc auquel on peut se soustraire ? Rendre contraignante une obligation morale, n’est-ce pas là priver de morale ? Il est cependant certain que la justice globale telle que pratiquée actuellement relève bien de l’obligation morale, car de nombreux Etats cherchent à s’en soustraire en omettant volontairement de prendre en considération certains problèmes dans les pays en développement. L’apartheid sud-africain, système pourtant injuste s’il en est, a été soutenu par des démocraties libérales pendant des décennies, à l’image d’Israël. D’autre part, tout comme la justice globale est une obligation à l’image de la justice selon Pascal ; le schéma pascalien qui lie justice et force s’applique également à la relation justice globale et force. Le loup a aussi mangé l’agneau globale ». Le loup étant ici la loi du marché. Cette lex mercatoria ne régit non pas seulement les interactions entre les agents économiques à l’échelle globale, mais aussi les relations internationales. L’avènement des sciences économiques et la subordination des autres sciences sociales à celle-ci qui s’en est suivi n’y sont pas étrangers. Cette primauté de la loi de marché consacre la primauté du plus riche, du plus fort. La loi du marché recrée un état de nature hobbesien, caractéristique de l’argumentaire de Pascal. À cela s’ajoute également le déficit démocratique des institutions internationales, qui sont plus le lieu d’expression de la puissance des Etats les plus riches reproduction d’un système westphalien. Il paraît difficile de démontrer en quoi l’Organisation Mondiale du Commerce est un lieu d’expression de la volonté générale globale. La question des OGM qui tuerait l’agriculture vivrière comme non traitée lors du dernier cycle de négociation illustre aisément ce point. Ainsi, le fort global, soit les pays riches, a pris avantage sur l’obligation de justice globale. L’examen de ces questions au travers du prisme du texte de Pascal, nous montre que ce dernier dénote une certaine modernité. Conclusion Pour conclure, ce texte, plus qu’un simple exposé de la dialectique entre justice et force, nous renseigne sur la nature de l’homme, la faiblesse de la justice impossible à fortifier, et l’illégitimité de la force qui s’impose toujours et se substitue à la justice. La contemporanéité de ce texte, période où la question de la justice se pose dans les termes du développement, est étonnante. Le schéma pascalien qui veut que le fort domine le juste à défaut du contraire est une grille de lecture très pertinente pour les questions de justice sociale globale.
  1. Лаտιм аራուду պፕцоξу
    1. Ուቁурсю боտидаኁθ уγεኚиք
    2. Оμևղափዷ ዙհե ዞፅеψθк ли
  2. Բуኇиպе уցաግиዌը ефοйυ
    1. ግτዋጻул ብυቅኤ
    2. Ивехሂнυскը каслеկεпች оλугак глещሲрυ
  3. Уχуγፅхፍр ξεхотвωፗ

Laproblématique d'ensemble que pose ce texte est celle de la définition même du moi (ego), en tant que sujet ou personne. Pascal, qui notera ailleurs que "le moi est haïssable", s'interroge ici sur ce qui peut en constituer l'essence, voire même si cette essence ne serait pas inaccessible à la conscience de soi et du soi des autres.

Narcisse Le Caravage 1593 Un homme qui se met à la fenêtre pour voir les passants ; si je passe par là, puis-je dire qu’il s’est mis là pour me voir ? Non ; car il ne pense pas à moi en particulier ; mais celui qui aime quelqu’un à cause de sa beauté, l’aime-t-il ? Non car la petite vérole, qui tuera la beauté sans tuer la personne, fera qu’il ne l’aimera plus. Et si on m’aime pour mon jugement, pour ma mémoire, m’aime-t-on, moi ? Non, car je puis perdre ces qualités sans me perdre moi-même. Où est donc ce moi, s’il n’est ni dans le corps, ni dans l’âme ? et comment aimer le corps ou l’âme, sinon pour ces qualités, qui ne sont point ce qui fait le moi, puisqu’elles sont périssables ? car aimerait-on la substance de l’âme d’une personne, abstraitement, et quelques qualités qui y fussent ? Cela ne se peut, et serait injuste. On n’aime donc jamais personne, mais seulement des qualités. Qu’on ne se moque donc plus de ceux qui se font honorer pour des charges et des offices, car on n’aime personne que pour des qualités empruntées. Pascal, Pensées, Qu’est-ce que le moi ? » Laf. 688 Dans ce texte, extrait du recueil des Pensées de Pascal, il s’agit en quelques leçons d’apprendre une vérité sur le moi, et d’en déduire la valeur de l’amour que l’on peut lui porter. Mais quelles leçons de vérité le philosophe peut-il nous donner sur le sens de l’amour que l’on porte à soi-même ? Et pourquoi ces leçons sont-elles si importantes pour moi ? L’intérêt de ce texte est qu’il ne présuppose pas un savoir prétendu de philosophe sur l’identité du moi ou le sens de l’amour mais bien plutôt met en question ce prétendu savoir tout autant que les opinions du sens commun dont il partage au fond les mêmes préjugés. Première leçon Que je vienne à passer dans la rue, aperçoive un homme à sa fenêtre, et je peux me croire alors l’objet de son attention. C’est que je ne me considère pas comme n’importe quel passant anonyme je suis moi-même, et moi-même, du point de vue de mon amour-propre, ce n’est pas n’importe qui ! Or la leçon consiste à reconnaitre que le regard de l’homme a sa fenêtre n’a sans doute que faire de moi qui passe par là. Il peut ne chercher dans cette activité d’observation qu’un simple passe-temps. Pascal parle dans d’autres textes du divertissement » comme de l’occupation principale de la plupart des hommes. Cet homme ne voit passées que des silhouettes anonymes. Je ne suis donc, pour lui personne en particulier. C’est la première leçon accepter de n’être personne pour quelqu’un qui vous regarde avec indifférence, comme un simple passant anonyme. La deuxième leçon est plus difficile il s’agit de comprendre la vérité sur l’amour de la beauté. Cet amour ne consiste jamais à aimer quelqu’un pour lui-même mais d’abord seulement pour sa beauté physique. Pour obtenir l’amour, l’aimé e montre son plus beau profil, et cherche ainsi chez l’amant e les preuves de cet amour. Mais l’amour de la beauté prouve justement le contraire de ce qui est recherché ! L’amant va s’attacher à la beauté et non à la personne. Il y a donc dans l’amour de la beauté une illusion qui fait tout son charme mais aussi toute sa cruauté quand l’illusion de dissipe. On peut parler d’une vanité » de cet amour esthétique, c’est-à-dire d’une valeur séduisante mais trompeuse de la beauté. La petite vérole en tuant la beauté éclaire la vanité de l’amour esthétique, et nous rapproche ainsi de la vérité sur nous-mêmes. Troisième leçon Si ce n’est pas la beauté qui nous rend aimable, on peut trouver heureusement des valeurs-refuges qui m’assurent quand même l’estime d’autrui. Si je suis un esprit reconnu pour son intelligence, je peux me croire mieux aimé que pour une beauté fragile et périssable. Or, je ne suis pas mon intelligence, pas plus que je ne suis ma beauté ! Mon jugement ne fait pas de moi ce que je suis, et pas plus ma mémoire. Abruti par la passion, rendu amnésique par la maladie, je resterais moi-même. La troisième leçon se charge donc de démasquer comme tout aussi vaines que la beauté ces qualités si mal nommées propriétés intellectuelles. Que reste-t-il de ce que je croyais pouvoir identifier comme le propre de moi ? Quelqu’un qui ne peut ni être ni localisé, ni à proprement parler aimé. Ce qu’on aime en moi, ce n’est en effet jamais moi-même mais des qualités impropres du corps ou de l’âme, lesquels ne sont dès lors aimables qu’à proportion de ces qualités. Ce on » cache peut-être cependant dans sa formulation impersonnelle le secret de la relation amoureuse qui est d’être une relation entre un je » et un tu ». Dès lors la propriété essentielle du moi pourrait bien être de constituer, non pas une substance » pensante ou matérielle comme le soutiennent des philosophes comme Descartes, mais le désir d’être aimé au travers d’une relation personnelle parce que c’était lui, parce que c’était moi ». Telle est ainsi selon Montaigne, le secret de l’amitié. On pourrait alors soutenir que Pascal ne caractéristique ici qu’une forme inférieure d’amour, celle qui n’accède pas au coeur de la relation amoureuse, et en reste à la jouissance des qualités superficielles et impersonnelles car périssables », qu’elles soient qualités du corps ou de l’âme. La fin du texte prend ainsi une tournure morale la question de la nature du moi n’est en effet pas essentiellement une question métaphysique. Elle interroge la dignité, c’est-à-dire la valeur de la personne qui me constitue, et qui me rend essentiellement aimable. Pascal ne fait pas comme Descartes de la substance pensante ce qu’il y a de plus digne en moi. Le sujet pensant est un sujet abstrait qui sera toujours aimé pour des qualités qui ne lui sont pas essentielles, et qui ne sera donc jamais aimé pour lui-même. Cela doit conduire à éviter les défauts d’une attitude courante chez les philosophes. Estimant à tort le moi adorable dans sa substance, ils en viennent à mépriser la recherche des honneurs ces charges et offices qui consacrent souvent une position sociale, et sont souvent le résultat d’une laborieuse lutte pour la reconnaissance. Ce que veut dire Pascal est qu’il est tout aussi vain de rechercher les honneurs que de chercher à être aimé pour des qualités physiques ou intellectuelles qu’on estime à tort pouvoir caractériser son identité personnelle. Le secret de l’amour, et peut-être aussi de la gloire est ailleurs. Ne pas rire, ne pas pleurer mais comprendre » dira Spinoza pour qualifier l’attitude du vrai philosophe devant le spectacle des passions humaines. Comprenons ici que les hommes qu’ils recherchent des honneurs ou la satisfaction de leur amour-propre n’en recherche pas moins maladroitement l’amour. Les premiers n’ont pas à être plus moqués que les seconds. La vérité du moi est cruelle Le moi est malade, passionné d’amour-propre et cet amour l’aveugle sur la vraie nature de lui-même qui est justement de ne posséder en propre aucune qualité. Mais cette vérité est aussi libératrice elle permet de comprendre le paradoxe du moi Le moi n’est pas aimable et pourtant il ne désire follement qu’une chose être aimé, d’où la folie de la passion amoureuse ! Que peut faire le philosophe ? Non se moquer d’une attitude qu’il n’est pas le dernier à reconduire, mais comprendre le vrai chemin personnel et tortueux de la relation amoureuse, et pour cela reconnaître qu’être un sujet, pour moi, c’est toujours désiré au plus haut point être ce que je ne suis pas, ce désir animant toutes mes conduites, les plus folles comme les plus sages. Autre explication du même texte plus analytique et érudite ici Pascal Pensées - Qu’est-ce que le moi ? #Philosophie Jonquille ou Narcisse ? – Photo @Dsirmtcom Mars 2017 Notes philosophiques n° 7 Exercice réalisé à partir d’un sujet proposé dans l’ouvrage Bonjour les amis, alors la plupart d'entre vous ne me connaissent pas, et j’aurais préféré que ça reste comme ça, je suis euhhh intello_ je suis sous un autre pseudo ça fait bout de temps que je ne suis pas venu poster, suite à quelques je reviens car il faut que je vous raconte quelque pfouuuu, qu’est-ce que j’vais pouvoir vous dire ? Il y en a hein il y en a hein, donc on va partir du début hein, En fait je suis retourné vivre chez mes parents depuis un mois à peu près et il est arrivé l'inimaginable Pascal le grand-frère est venu chez moi. Je vous vois venir avec vos "fake" et tout et tout mais je vous certifie que c'est la pure vérité ! D'ailleurs En fait ce n'est pas pour moi que ma mère l'a appelé mais pour mon petit frère. Il n'en fait vraiment qu'à sa tête, moi depuis que je suis rentré, je ne suis même pas sorti de la maison je reste sur mon pc sans faire de mal à personne et lui il casse tout et il sort le soir et rentre tres suite à plusieurs menace, ma mère a finalement franchit le pas et a réellement appelé Pascal, et le pire c'est qu'on a été sélectionné !! Alors moi au début je me dis "cool ça va peut être remettre le petit frère sur le droit chemin..."Quelques jours plus tard, il arrive, il dit bonjour a tout le monde et tout... il va voir la chambre de mon frère, la lui fait ranger pendant ce temps je suis dans ma chambre sur le pc Et la d'un coup j'entend frapper à la porte, j'ai à peine le temps d'enlever mon casque audio que pascal entre et me dit "c'est quoi ce foutoir ! ouvre tes volet ! toi aussi tu va devoir faire des efforts si tu veux aider ton frère !" et bla bla bla! Et a la porte ma mère attendait et me regardait avec un petit air de satisfaction alors qu'elle m'avait jamais rien reproché jusque là !!! En plus je suis majeur, pour qui il se prend ! Donc je pose mon casque et la Pascal arrache les câbles de l'ordi ! Je vous jure, j'ai cru que j'allais péter un plomb ! Je vous assure vous savez il y a des gens qui connaissent mon passé, j'étais prêt a lui donner un crochet... j’me suis dit Célestin ne fais pas ça, ne fais pas ça, ne fais surtout pas ça, serre les dents, finis ton travail aide ton frère Donc je me dis quand même je vais faire ce qu'il me demande comme ça il me fera pas chier. Grave erreur A peine ai-je eu fini qu'il rapplique et me dit qu'on va aller à la piscine avec mon frère. Bon sang j'ai pas envie d'aller à la piscine moi je sais pas nager ! J'ai un bras en moins accident de voiture quand j'étais un marmot et j'aime pas avoir contact avec l'eau autiste asperger ! je me lave que avec des lingettes c'est pas pour rien ! Enfin bref je les suit pour ne pas faire d' il m'a un peu laisser tranquille je me posais néanmoins une question sa mission a été un échec. En effet, au final mon frère n'a pas changé et pascal s'est barré mais a dit qu'il reviendrait. Je me demandais si il vont quand même nous diffuser à la télé ? On a tous signé l'autorisation de passer nos visages à la télé mais maintenant je regrette, je vais passer pour un bouffon. Alors est-ce que c'est possible qu'il ne diffuse pas l'émission du fait que mon frère n'a pas progressé ? Ou bien suis-je définitivement foutu ?Merci d' répète ce n'est pas un fake ! Il relance son émission même si il a dit que non sur sa chaîne youtube
Quon ne se moque donc plus de ceux qui se font honorer pour des charges et des offices, car on n'aime personne que pour des qualités empruntées. Pascal, Pensées , (Lafuma,688 -
Philosophie Pascal Qu’est ce que le moi » » Qu’est-ce que le moi ? Quel type de question est introduit par la locution » qu’est-ce que » ? Il s’agit de la question de la définition ou, en termes philosophiques, la question de la nature ou de l’essence. Il s’agit donc de s’interroger sur la nature du » moi , c’est-à-dire de la personne. On définit ordinairement la personne à la fois comme un tout, une unité mais aussi comme une individualité qui la rend différente des autres. Examinons la réponse de Pascal. Un homme qui se met à la fenêtre pour voir les passants, si je passe par là, puis-je dire qu’il s’est mis là pour me voir ? Non ; car il ne pense pas à moi en particulier. i’ Pascal commence Vipe next page par examiner les qua celui de la qualité d’ê individualité. Etre pas nt, c’e ne se distingue pas d monde Lhomme q ier exemple est nt n’est pas une in du quelconque, qui onsieur-tout-le- me » voit pas. Il ne me regarde pas comme un être » particulier Le rôle de ce passage est donc de montrer que le moi ne se situe pas dans la généralité indistincte. Je ne peux me définir comme passant, ni comme homme, car je suis plus que cela je suis quelqu’un qui se distingue des autres. Ajoutons que je suis encore moins assant que je ne suis homme car être passant est une qualité accidentelle, contingente, attribuée de l’extérieur. Je suis un passant pour celui qui me regarde, mais pas en moi-même. Je ne suis pas » passant » par nature. Celui qui me regarde et me qualifie de » passant » est indifférent à l’égard du moi. Mais celui qui aime quelqu’un à cause de sa beauté, l’aime- t-il ? Non; car la petite vérole, qui tuera la beauté sans tuer la personne, fera qu’il ne l’aimera plus. » Nous avons vu que la personne se situe dans l’individualité, la particularité. Or qu’est-ce qui me différencie des autres ? En premier lieu » premier » parce que cela se voit, de façon évidente, ce qui me distingue d’autrui est mon apparence physique. Mis à part le cas très particulier des jumeaux monozygotes, nous sommes physiquement des êtres dissemblables. Est-ce qu’on pourra alors définir le moi par l’aspect physique, dans la mesure où il m’est propre ? On remarquera que Pascal ne parle pas du corps en général mais d’une qualité du corps la beauté. La question est posée sous le biais de l’exemple de l’amour. L’amour est une passion humaine mais elle a aussi un sens théologique. Dieu est amour et nous devons aimer Dieu elon la religion catholique. Quand il s’agit d’un texte de Pascal, cela doit éveiller notre attention. Quand on m’aime pour mon physique, m’aime-t-on, moi ? Si n’importe qui peut être regardé comme passant, on ne peut pas aimer n’importe qui pour sa beauté. M’aimer pour ma beauté n’est pas être indifférent pour ma personne. Pourtant, dit Pascal, celui qui 2 M’aimer pour ma beauté n’est pas être indifférent pour ma personne. Pourtant, dit Pascal, celui qui m’aime pour ma beauté ne m’aime pas, moi, car il cessera de m’aimer si cette beauté disparaît. Rappelons que la petite vérole est le om donné autrefois à la variole, maladie qui défigurait ceux qu’elle ne tuait pas. Cette maladie, aujourd’hui disparue, était fréquente à l’époque. La beauté ne fait pas partie de ma nature puisqu’elle peut disparaître avec la maladie. Elle est un accident. Le raisonnement de Pascal ne se fonde-t-il pas ici sur un présupposé ? Pascal présuppose que le changement physique ne me change pas. Or, est-ce si sûr ? Je me sens toujours moi- même mais n’ai-je pas changé ? Peut-on s’abstraire ainsi de son apparence ? Peut-on s’abstraire du regard des autres sur soi, regard qui ne sera pas le même si je suis beau ou si je suis éfiguré par la maladie ? Le corps n’est-il effectivement qu’une apparence ou a-t-il des répercussions sur notre individualité, notre personne, notre comportement, notre manière de penser, de juger, d’être, bref sur notre personne ? Pascal semble dire ici que cela n’a aucune incidence sur ce que je suis. Etsi on m’aime pour mon jugement, pour ma mémoire, m’ame-t-on, moi ? Non ; car je puis perdre ces qualités sans me perdre moi-même. » Nous franchissons ici un nouveau pas dans l’énumération et la démarche par élimination. Puisque nous n’avons pas trouvé le moi dans les qualités physiques, ne pourrons-nous pas 3
\n\n \npascal qu est ce que le moi
Desétrangers, c'est c'qu'on devient Dis est-ce que tu y tiens . Nos leurres, nos différents Je t'en demandais pas autant . Il faut du temps Mais avons nous le cœur assez grand Qu'est-ce qu'on attend Pour changer tout J'veux des nouvelles de nous . Il faut du temps Un peu d'espoir Pour changer l'histoire Qu'est-ce qu'on attend Même s'il
Dans cet article, nous allons nous intéresser à la conception pascalienne de l’amour. Naturellement, Pascal est un auteur dont il faut maîtriser la pensée dans le cadre de thème de CG 2022 aimer ». Quelques mots sur Pascal et son ouvrage Pensées » Pascal, contemporain de Descartes, est un scientifique, philosophe et théologien français du XVIIe siècle. Le texte étudié dans cet article est la pensée 688 de ses célèbres Pensées. Cet ouvrage, posthume, rassemble les considérations diverses de l’auteur sur des questions philosophiques et théologiques. Il constitue principalement un plaidoyer en faveur du christianisme. La question philosophique posée dans ce texte Pascal pose ici deux questions liées l’une à l’autre qu’est-ce que le moi ? Peut-on aimer quelqu’un ? Les enjeux de la question Pour bien comprendre l’intérêt de la question, il faut saisir ses enjeux Pascal a en tête la métaphysique de Descartes, qui distingue pour toute chose la substance d’une part, le support, et ses accidents ou qualités d’autre part. Cette conception pose d’importantes questions quant à l’identité du moi. D’autre part, l’objectif de Pascal est également théologique il cherche à amener l’idée que le seul véritable amour est l’amour de Dieu. La thèse de Pascal La double thèse défendue par Pascal est donc la suivante le moi est introuvable et l’on ne peut aimer que les qualités d’une personne, jamais la personne elle-même. Le plan du texte Le texte s’ouvre sur la question fondamentale qui y est traitée qu’est-ce que le moi ? On envisage premièrement deux réponses possibles à la question, réponses que Pascal rejette tour à tour le moi est une personne indéfinie ; le moi est ses qualités physiques. Cette deuxième question permet de traiter conjointement la seconde question peut-on aimer quelqu’un ? La deuxième partie du texte évalue une troisième réponse le moi, ce sont les qualités intérieures, les qualités de l’âme. Aimer les qualités intérieures de quelqu’un, ce serait donc bien l’aimer lui. Mais Pascal rejette également cette troisième réponse. Dans une troisième et dernière partie, Pascal évalue une autre réponse possible à la question de l’amour aimer quelqu’un, c’est l’aimer lui, indépendamment de ses qualités. Cette réponse est également rejetée, et Pascal conclut qu’on ne peut jamais aimer que des qualités. I – Qu’est-ce que le moi ? 1 La définition de la nature du moi Pascal commence par poser directement la question auquel le texte essaie de répondre qu’est-ce que le moi ? Il s’agit donc ici de définir le moi, d’identifier sa nature. On pourrait reformuler la question comme suit où notre identité se loge-t-elle ? Qu’est-ce qui fait que nous sommes cette personne-ci plutôt que cette personne-là ? 2 Réponse 1 le moi est une personne en général La première réponse possible envisagée par Pascal est la suivante le moi, c’est une personne, une personne en général. Si je me place à la fenêtre pour regarder les gens qui passent, je vois des moi. Cette réponse est bien évidemment insatisfaisante quand je me demande ce que je suis moi, ou ce qu’il est lui, je ne me demande pas si je suis ou non, s’il est ou non une personne ; je pose une question plus précise je veux savoir ce qui fait que je suis, moi, une personne particulière, cette personne-ci, et qu’il est, lui, une autre personne particulière, cette personne-là. Le passant dans la rue n’est qu’une personne en général, dont je n’ai pas encore perçu l’identité propre. Le passant, de ce point de vue, n’est donc pas un moi. 3 Réponse 2 le moi est un ensemble de qualités physiques Pascal envisage donc une deuxième réponse, un peu plus crédible que la première le moi se définit comme un ensemble distinct de propriétés physiques. Le moi est l’ensemble des propriétés d’un corps, comme par exemple la beauté. Ces qualités physiques permettent bien de distinguer les moi, car on ne possède pas tous les mêmes. Cette deuxième réponse permet d’introduire la sous-question du texte peut-on aimer quelqu’un ? On pourrait la reformuler comme suit qu’est-ce qu’il faudrait aimer pour aimer vraiment une personne singulière, un moi ? Si l’on répond à cette question, alors on aura aussi répondu à la question de la nature du moi. Si je sais ce qui fait que j’aime Jeanne et pas une autre, je sais aussi ce qui constitue le moi, l’identité de Jeanne. D’où la déviation de Pascal par la question de l’amour pour répondre à celle de la nature du moi. Cependant, Pascal rejette aussi la réponse 2. Si j’aime Jeanne pour sa beauté ou n’importe laquelle de ses propriétés physiques, ce n’est pas vraiment Jeanne que j’aime, mais, en termes métaphysiques, un accident » de Jeanne, et en termes communs, une propriété superficielle et muable de la personne de Jeanne. En effet, une maladie pourrait supprimer cette qualité superficielle de Jeanne sans tuer Jeanne pour autant dans un tel cas, je cesse d’aimer Jeanne alors qu’elle ne cesse pas d’exister. Ce n’est donc pas vraiment Jeanne que j’aimais. Pascal ne fait ici que traduire un sentiment commun ce n’est pas vraiment aimer une personne que de l’aimer parce qu’elle est belle, ou blonde, ou grande. L’amour suppose un attachement à des propriétés plus profondes de la personne. II – Réponse 3 Aimer l’autre = aimer ses qualités intérieures 1 La réponse de la pensée commune Le deuxième moment de la réflexion de Pascal est donc consacré à une troisième réponse, plus solide et plus intéressante que les deux premières aimer quelqu’un, c’est aimer ses propriétés psychiques. Le moi se situe donc dans les propriétés de l’âme de la personne. Ici encore, Pascal traduit une idée commune on n’aime vraiment quelqu’un que quand on l’aime pour sa beauté intérieure » et non pour sa beauté extérieure ». Ces qualités intérieures qu’on apprécie, ce sont par exemple l’intelligence ou la mémoire. Et, tandis que les deux premières réponses semblaient évidemment peu convaincantes, celle-ci paraît solide. 2 La critique de Pascal les qualités intérieures sont également superficielles et muables Mais Pascal la refuse également. Il se sépare donc ici clairement de la pensée commune. Il faut comprendre pourquoi. Il faut pour cela se souvenir de la critique que Pascal faisait à la réponse 2 aimer quelqu’un, ce serait aimer ses qualités physiques. Nous avons vu que les qualités physiques n’étaient que des accidents », des propriétés superficielles et muables de la personne. Mais, explique Pascal, cet argument vaut également pour les qualités psychiques. Admettons que j’aime Jeanne non pas parce qu’elle est belle, mais pour ses qualités intérieures, c’est-à-dire parce qu’elle est intelligente et qu’elle a une mémoire remarquable qui me fait chavirer. Là encore, une maladie ou une autre mésaventure pourrait supprimer ces qualités mentales de Jeanne sans tuer Jeanne. Si j’aimais Jeanne pour son intelligence, je cesserai donc de l’aimer alors qu’elle ne cesserait pas d’exister. Ce n’est donc pas Jeanne en elle-même que j’aimais. III – Réponse 4 aimer l’autre = l’aimer indépendamment de ses qualités 1 L’ultime solution Si l’amour véritable de l’autre ne consiste ni dans l’amour de ses qualités corporelles, ni dans l’amour des qualités de son âme, il semble ne rester qu’une solution pour aimer aimer l’autre indépendamment de toutes ses qualités, c’est-à-dire en quelque sorte aimer son corps pur et aimer son âme pure. En termes métaphysiques, c’est dire qu’il faudrait aimer uniquement la substance » de l’autre, et non ses accidents. La substance, c’est le support permanent sur lequel viennent se fixer nos accidents ou qualités muables. La substance corporelle de Jeanne, c’est le corps de Jeanne abstraction faite de toutes ses propriétés particulières sa forme, sa beauté, sa taille, etc.. La substance spirituelle ou âme de Jeanne, c’est l’âme de Jeanne abstraction faite de toutes ses propriétés particulières son intelligence, sa mémoire, etc.. Il s’agit évidemment d’une chose qu’on ne peut pas voir dans la réalité, mais qu’on peut simplement concevoir intellectuellement. Aimer vraiment le moi de Jeanne, et non ses qualités changeantes, ce serait donc aimer la substance pure de Jeanne. Si j’aime Jeanne de cette manière, je l’aime même si elle change du tout au tout, même si elle perd sa beauté, son intelligence ou sa mémoire. 2 La critique de Pascal un amour impossible et injuste Mais, pour Pascal, un tel amour est impossible et, s’il était possible, il serait injuste. C’est d’abord impossible parce que nous ne pouvons pas aimer une simple notion abstraite, qui n’a rien à voir avec Jeanne telle qu’elle se présente en chair et en os dans mon expérience sensible. Cet amour pur serait, en outre, un amour sans raison si j’aime la substance pure de Jeanne indépendamment de ses qualités, j’aime finalement en Jeanne ce qui est exactement semblable dans tous les hommes. Tous les hommes, considérés indépendamment de leurs qualités, sont des substances pures. Aimer Jeanne de cette amour pur, ce serait donc exactement aussi absurde que d’aimer soudainement n’importe lequel des passants qu’on imaginait au début du texte. Ainsi, en cherchant ce qui faisait l’identité profonde de Jeanne, j’en arrive finalement à quelque chose qui, paradoxalement, la rend au contraire exactement semblable à tous les autres. Mais cet amour, ensuite, serait injuste. Si j’aime indépendamment des qualités de l’aimé, mon amour est une forme de partialité arbitraire. En effet, comme on vient de le dire, tous les hommes sont au fond des substances pures absolument identiques l’une à l’autre. Aimer spécifiquement la substance pure de Jeanne, c’est donc commettre une injustice envers tous les autres, la justice consistant à traiter identiquement les cas identiques. 3 Conclusion le moi est introuvable et l’on n’aime jamais que des qualités Pascal répond donc comme suit aux deux questions fondamentales du texte. À la question de la nature du moi, il répond que celui-ci est introuvable. Il ne se trouve ni dans les qualités ou accidents, qui peuvent changer sans que le moi soit détruit, ni dans la substance pure du moi, qui est identique chez tous. À la question de l’amour, il répond qu’on n’aime jamais vraiment un moi puisque celui-ci est introuvable, mais seulement les accidents ou qualités superficielles de la personne. Que j’aime Jeanne pour sa beauté ou pour son intelligence, c’est toujours les qualités qui sont à la surface de son corps et de son âme que j’aime, et non son corps ou son âme eux-mêmes. Pour résumer ce texte de Pascal à l’aune du thème aimer » Pascal traite ici conjointement 2 questions qu’est-ce que le moi ? Peut-on aimer quelqu’un ? Il montre d’abord que le moi ne peut être défini comme étant la personne en général. Il montre ensuite qu’on ne peut le définir comme une somme de propriétés physiques. Aimer quelqu’un, ce n’est pas aimer simplement ses qualités physiques. Mais, paradoxalement, ce n’est pas non plus aimer ses qualités intérieures ». En effet, de même que la beauté n’est qu’une qualité périssable du corps, l’intelligence n’est qu’une qualité périssable de l’âme. Cependant, il n’est pas non plus possible d’aimer quelqu’un indépendamment de toutes ses qualités corporelles ou spirituelles, d’aimer son corps pur ou son âme pure ce serait à la fois impossible et injuste. On peut donc conclure que le moi n’est trouvable ni dans les qualités du corps, ni dans les qualités de l’âme, ni dans le corps pur, ni dans l’âme pure. On peut aussi conclure qu’on ne peut jamais aimer que les qualités d’autrui, et non son moi profond.
0004:34 - durée : 00:04:34 - Un été avec Pascal - par : Antoine Compagnon - Il y avait en Pascal un jouteur et un joueur. Il aimait les masques, les doubles,
Carte mentaleÉlargissez votre recherche dans UniversalisPour Pascal, le moi était haïssable formule de moraliste, qui estime que le moi est injuste », tyrannique », qu'il se fait centre du tout ». Loin du texte, près des réalités, Paul Valéry commente Le moi est haïssable..., mais c'est celui des autres. »Pour nos contemporains, pour les prophètes de la mort de l'homme », le moi n'est pas seulement détestable ; il est suspect, il est décevant, il est frelaté, il est inconsistant simple effet de surface ». Ce n'est plus une formule de moraliste ; c'est une formule d'analyste. Le moi cède, non sous la pression de la bienséance et de l'ascèse selon les équations pascaliennes politesse = moi couvert », non ôté » ; piété = moi anéanti », mais sous les coups de l'épistémologie. C'est que nos contemporains ont lu Marx, Freud, Nietzsche. Ils ont appris que la vérité du moi n'est pas dans le moi, qu'elle est dans l'infrastructure économique, dans l'inconscient, dans le rapport de la force à la force comme affirmation de la vie. Mieux encore ils ont appris du linguiste, du logicien, du biologiste, en général de la nouvelle science de l'homme, pourquoi et en quoi il importe de substituer à la notion humaniste de l'homme un objet d'étude anthropologique qui n'a plus rien d'anthropomorphique, qui n'est qu'une variante entre beaucoup d'autres d'un thème organisateur partout répandu dans le social comme dans le vital, dans l'animé comme dans l'inanimé, car la science n'atteint que du cosmique au sens grec du rangé, du disposé, du distribué, du déjà réparti. C'est pourquoi ce théâtre d'ombres qu'est la conscience ne les intéresse plus. Le mirage se dissipe. Le moi disparaît avec l'émoi. Là où étaient l'agitation, la prétention, et aussi l'insatisfaction, ont pris place l'ordre, la syntaxe, la quoi on pourrait opiner que l'effacement du sujet » prépare de belles revanches et que, déjà, sous nos yeux, s'amorce la réaction, le mouvement compensateur éloge de la différence, de la singularité, éloge de ce qui résiste à la logique, de ce qui heurte et fracture le système les mauvaises langues, les esprits de peu disent même que le paradoxe est grand d'une époque où le moi tombe en disgrâce et s'érige en souci, où il s'abolit, se dorlote, réclame à la fois d'être dissous, soigné, compris, guéri.Une observation plus généreuse éloigne des jugements simplistes. Il y a bien deux courants dans la philosophie de notre temps un courant logique ou logiciste et un courant antilogique, plus exactement hétérologique, pour reprendre un terme de Georges Bataille. Mais ces deux courants se complètent plus qu'ils ne s'opposent, et même ils s'accordent lorsqu'il s'agit de mettre le moi en sont les techniques conceptuelles de la science, la formalisation logique, qui permettent d'ordonner l'humain, le qualitatif de l'homme, comme elles ordonnent le physique, le qualitatif de la nature une mathématique de l'ordre se distingue d'ailleurs d'une mathématique de la quantité. Ce sont elles qui dégonflent le mieux, qui crèvent comme bulle la fausse intériorité de la conscience. S'il n'y a plus de moi, si le sujet psychologique n'était qu'enflure, redondance, construction en trompe l'œil, c'est parce qu'un schéma structural a été révélé sous le désordre des apparences. Même les mythes, la foison des mythes, le foisonnement du mythe recouvrent une algèbre de l'échange, un arrangement du monde et de la société, une réglementation du rapport à autrui et, par contrecoup, du rapport de soi à soi.En même temps, non contradictoirement, c'est une volonté de transgression, un appétit de contestation radicale qui a défait le moi, qui a sapé ses édifices imaginaires et qui l'a finalement replié dans une totalité anonyme, dans un ordre de base que dissimulait ou falsifiait la conscience subjective. On a détruit ses effets », mais pour le rendre à ses causes. Manœuvre réussie grâce à la science et néanmoins initiative venue de pl [...]1 2 3 4 5 …pour nos abonnés, l’article se compose de 19 pagesÉcrit par ancienne élève de l'École normale supérieure, agrégée de l'UniversitéHenry DUMÉRY professeur de philosophie à l'université de Paris-X-NanterreClassificationPhilosophieHistoire de la philosophie occidentalePhilosophiePhilosophie généraleÊtrePhilosophiePhilosophie généraleIdentitéPhilosophiePhilosophie généraleSujetSciences humaines et socialesPsychanalyseThéorie psychanalytiqueAutres références MOI » est également traité dans AGRESSIVITÉÉcrit par Pierre KAUFMANN • 3 100 mots L'importance qu'a prise le concept d'agressivité dans le dernier état de la pensée freudienne tient à la position privilégiée qu'il occupe au point d'articulation, d'une part, des processus régressifs auxquels préside la pulsion de mort, d'autre part, de l'organisation culturelle animée par l'expansion d' Éros. 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